La pyramide des apprentissages ou la naissance d’un neuro-mythe?

with Aucun commentaire

On retient 5% de ce qu’on entend, 10% de ce qu’on lit, 20% lorsque de ce que l’on voit et entend… ça vous dit quelque chose ? Mais en fait, est-ce bien vrai tout ça ?

La pyramide des apprentissages est fréquemment utilisée dans le domaine pédagogique et enseignée dans de nombreuses formations d’enseignants. Dans cette conception, on propose une hiérarchisation des situations d’apprentissage de la plus à la moins efficace. Celle-ci est accompagnée des chiffres présentant le pourcentage de rétention de l’information.

Pourtant, cette pyramide a été détournée de sa réalité première. Edgar Dale propose cette représentation sous forme de cône pour la première fois dans son ouvrage « Audio-visual methods in teaching » paru en 1946. Celui-ci avait pour objectif d’illustrer les expériences d’apprentissage en fonction de leur degré d’abstraction : de l’expérience la plus directe à l’expérience la plus abstraite. Il semblerait même qu’il ait anticipé cette situation en insistant sur le fait qu’il ne s’agissait pas d’une hiérarchie entre les différentes strates. Au niveau des chiffres qui y sont fréquemment associés, il semblerait que ce soit une firme de formation qui les a ajoutés. Ceux-ci ne reposent d’ailleurs sur aucune base scientifique vérifiée. Ce qui est encore plus troublant, c’est que les chiffres peuvent varier d’une présentation à l’autre et qu’ils évoluent selon une suite de chiffres ronds tous multiples de 5. Lorsque l’on cherche à vérifier la véracité de la pyramide, les résultats sont souvent plus subtils (Dessus & Charroud, 2020) et variables en raison d’autres facteurs, notamment ceux liés au contexte. Ce qui est sûr à l’heure actuel et attesté par les recherches, c’est l’importance de varier les types d’expériences sensorielles proposées aux apprenants.

Cette pyramide peut donc être ajoutée à la liste des neuromythes fabriqués qui ont percolé et se sont installés au fil du temps. Cet exemple montre bien l’importance d’observer un regard critique sur les théories de l’apprentissage généralisées et simplifiées à l’extrême pour en faire un modèle « marketing » attrayant.

N’oublions pas que l’apprentissage est un acte ô combien complexe et dépendant d’une multitude de facteurs. Le jour où l’enseignement se résumera à une suite de recettes toutes faites, les enseignants seront remplacés par des machines chargées d’appliquer le programme standardisé le plus adapté. Heureusement, pour nous il s’agit d’une personne avec son parcours, son histoire et son unicité qui apprend. La pédagogie est, avant tout, une aventure humaine et c’est ça qui en fait le plus beau métier de monde. Alors, continuons d’explorer des nombreuses voies pour mieux comprendre l’apprendre sans toutefois se méprendre sur les théories qui font vendre.

Bibliographie

Dessus, P., & Charroud, C. (2020, Mars 12). Quelques mythes dans la recherche en éducation. Récupéré sur Espé: http://espe-rtd-reflexpro.u-ga.fr/docs/sciedu-general/fr/latest/mythes_education.html
Dufêtre Badja, V. (2019, septembre 4). Le cône d’apprentissage d’Edgar Dale n’est pas celui que l’on croit…. Récupéré sur X-OS learning: https://www.xos-learning.fr/blog/le-cone-dapprentissage-dedgar-dale-nest-pas-celui-que-lon-croit/

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *